Lettre ouverte au Ministre d’État, ministre de la Fonction Publique

Monsieur le Ministre d’État, nous avons suivi avec intérêt votre speech à travers une vidéo largement partagée dans laquelle vous affirmez ceci: “Y a pas ce corps dans notre pays qui n’a pas un fonds commun. Je m’explique :[….]Quand je prends l’enseignant qui estime que lui il n’a pas de fonds commun. Quand on estime qu’un enseignant ne doit pas inscrire son enfant en payant la scolarité, que ça doit être gratuit. Que vous le voulez ou pas c’est un fonds commun…” Certains n’en croyaient pas à leurs oreilles malgré la vidéo. À travers les colonnes de BurkinaWeb.net, vous êtes revenu pour confirmer ses propos. Par le même canal nous souhaitons vous adresser la présente missive.
Monsieur le ministre, il eut un temps où notre fonction publique portait les griefs d’une fonction publique à double vitesse. Les deux poids deux mesures étaient légion. C’est sans doute au regard de cela que la loi 081 CNT du 15 novembre 2015 portant statut général de la Fonction Publique d’État a vu le jour après l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 dont la finalité était d’aplanir les iniquités entre les agents de la Fonction Publique. Cette loi, qui à l’entendement de tous devrait sonner le glas de l’injustice entre les agents de la Fonction Publique, stipule que ces derniers  ont les mêmes droits et les mêmes devoirs.
Monsieur le Ministre d’État, votre nomination à la tête de la fonction publique sonnait comme un espoir pour des milliers d’agents, surtout vos admirateurs eu égard à vos prises de position pour la justice et l’équité sociales durant votre magistère à la tête de la CGT-B. Si vos prédécesseurs n’ont pas apporté grand-chose pour l’amélioration de ce Ministère, ils n’ont pas non plus justifié l’iniquité. Mieux nous avons suivi comment le ministre Rosine Coulibaly s’est débattu dans cette histoire de fonds communs.
Vous étiez contre la remise à plat, donc nous ne sommes pas surpris que vous usiez de subterfuges pour contourner ce problème que l’État devrait avoir le courage d’affronter avec ou sans vous. Même si vous manquez d’arguments pour défendre votre position, l’exemple pris pour illustrer que les enseignants ont un fonds commun manque de décence et j’ose espérer que les syndicats de l’éducation vont vous recadrer comme vous en aviez l’habitude quand vous étiez de l’autre côté. On ne célèbre pas l’injustice en prenant comme exemple d’autres injustices. En attendant , la loi 013-2007/AN portant loi d’orientation de l’éducation à son article 6 dit que l’enseignement de base public est gratuit. Cette gratuité exclut le versement d’une somme quelconque au titre des frais d’inscription et ce, tout au long de la période de scolarité obligatoire. C’est quelle scolarité que les enseignants devraient payer pour leurs enfants et qui constituerait leur fonds commun ?
Dans notre fonction publique actuelle, il faut oser le reconnaître, il y a les uns et les autres. Les uns sont les privilégiés parce que « forts » ou « craints ». Ceux-là bénéficient de leurs droits et même des avantages supplémentaires sans tambour battant et les laissés-pour-compte, les parents pauvres de la Fonction publique, les mal-aimés. Ces derniers, doivent toujours se sacrifier sans avantage en utilisant leurs propres moyens pour exécuter leurs tâches quotidiennes. Parmi ceux-là, les agents de l’éducation en général et les enseignants en particulier occupent les premières loges. Le sentiment d’abandon social et administratif par votre département anime actuellement les agents de l’éducation perdus et désemparés face à votre sortie qui sonne comme un mépris. Dans l’histoire récente, vous étiez un professeur. Si vous affirmez aujourd’hui que les enseignants ont un fonds commun, cela voudrait dire que vous en avez bénéficié. Que dira l’opinion publique ? Si vous vous sentez incapable de réduire les inégalités entre les agents de la fonction publique prôné par le Chef de l’État, capitaine Ibrahim TRAORE, il faut trouver d’autres arguments. N’insultez pas le monde éducatif qui ploie déjà sous le poids d’un statut particulier grabataire.
Là où nous vous attendions c’est sur ce terrain. Le terrain de réparation des impairs de la loi 081 et du décret 2020-245. En effet, la loi 081 a inversé la pyramide au niveau de la grille salariale et le décret 245 est venu l’accentuer. En attendant, nous osons croire que votre sortie dévoile vos intentions futures en faveur du monde éducatif. C’est-à-dire, la création et l’institutionnalisation d’un fonds commun au MENAPLN. Toutefois, si votre sortie est une intention voilée pour préparer l’opinion publique au maintien du fonds commun pour une catégorie d’agent de la fonction publique, vous venez de commettre une bourde que la transition gagnerait à rectifier le plus rapidement possible.
Monsieur le Ministre d’État, nous osons croire que vous ressortirez pour clarifier vos propos et pourquoi pas présenter vos excuses au monde éducatif si les mots ont trahi votre pensée.
Dans l’espoir que cette missive vous parviendra et suscitera une prompte réaction de votre part,  monsieur le Ministre d’État, veuillez recevoir  l’expression de mes sentiments cordiaux et respectueux.
Fait à Bobo-Dioulasso le 16 décembre 2023
Ousmane BAMOGO , Inspecteur de l’Enseignement Primaire et de l’Éducation Non Formelle

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