Le mot condamné a le plus résonné le 1er septembre 2019 dans la salle des banquets de Ouaga 2000. Après une année de confessions, de tergiversations de civils, de militaires comme de politiques ayant participé au « coup d’état le plus bête au monde », la sentence du juge est tombée en fin de matinée ce jour libérant les relaxés et autres qui avaient intérêts à ce qu’il finisse.
Sur les accusés, on pouvait dénombré des grosses figures de l’élite intellectuelle, politique et militaires mais aussi des civils dans le rôle de Voyageurs représentants placier (VRP) dans les bons offices d’officines politico-militaires. Une mosaïque d’accusés qui rehaussait le niveau et le thermomètre social du procès.
Qu’à cela ne tienne, contre critiques et selon leur conscience, comme le stipule leur déontologie, les juges du tribunal militaire a prononcé les peines attendant que les avocats des parties acquiescent ou qu’ils désapprouvent dans les quinze jours qui suivent. Du haut de son magistère, le juge a prononcé des relaxations, des condamnations à des peines de prison ferme mais aussi à des peines avec sursis. Le général Gilbert Dienderé, principal accusé et cerveau du coup d’état maqué est condamné à 20 ans de prison ferme. Djibril Bassolé, Guelwaré Minata sont condamnés à 10 ans. Le capitaine Dao Abdoulaye condamné à 11 ans. Zerbo Lahoko Mohamed, Le sergent-chef Sanou Ali, Koussoubé Roger à 15 ans. Notre confrère Ouedraogo Adama dit Damiss condamné à 5 ans de prison, Bamba Amadou qui a confessé avoir été « la mascotte » de ce putsch a écopé de 10 ans dont 5 ans assortis de sursis. Du tristement célèbre régiment de sécurité présidentiel, il y a aussi l’adjudant-chef major Badiel Eloi qui, selon le juge, devra moisir dans sa cellule 19 ans durant. Avec lui, Moussa Nebié dit Rambo à 17 ans. Le malien Sidi Lamine Omar lui aussi, est contraint à 5 ans de prison ferme dont 3 ans assortis de sursis. La facette politique des accusés, représentée par Léonce Koné, Hermann Yameogo a pris cinq années assorties de sursis. L’homme de tenue Boureima Kéré écope de la même peine que les politiques.
Des avis partagés
Les avis suite à cette parole d’évangile du juge ZANGRE divergent. Pour certains observateurs de la scène politique, le délibéré est tombé comme un lourd couperet détruisant au passage l’éventuelle réconciliation nationale. Eux se basent sur la carrure des « pécheurs » au confessionnat du juge et le symbole et/ou le poids qu’ils pourraient avoir dans un éventuel processus de réconciliation future. Pour d’autres il n’y a pas matière à s’attarder, le délibéré est entaché de clémences suspectes à l’endroit des politiques par exemple. A ce groupe s’ajoutent ceux qui pensent que la main de la justice a été lourde envers les jugés par contumace (ndlr, ceux qui sont absent du pays au moment du jugement pour une raison ou pour une autre). Aux côtés d’eux une autre chapelle sectaire y prêche le langage du coup d’épée dans l’eau. Est-ce que cela valait la peine, vu ce que le contribuable y a dépensé par ce résultat.
Camille OUEDRAOGO pour www.lesoleil.bf
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Un symbole pour la démocratie
L’on peut dire tout de même que ce linge national lavé en public a permis de creuser la tombe des coups d’état au Burkina Faso. En effet, ce pays est coutumier de ce genre d’actes lorsque les maillons de la démocratie lâchent. Aux devants de ces changements de régime, des militaires. Notons, de 1960 à nos jours, notre pays a connu deux soulèvements populaires et quatre coups d’état dont les initiateurs et bénéficiaires étaient des militaires.
Par ce procès, l’on pourrait dire que le régime de Roch Marc Christian KABORE, qui n’est pas la victime de ce coup de force qua perpétré majoritairement les éléments du Régiment de sécurité présidentielle (garde prétorienne de Blaise COMPAORE), a tenu à faire d’une pierre deux coups. Primo, réaffirmé sa volonté de construire la démocratie en y associant un de ses maillons forts la Justice. Deuxio, donner à cette justice les moyens de s’exercer et s’assumer (ndlr, il l’a déjà affirmé avec la revalorisation du statut des Magistrats) par une augmentation de ses moyens matériels et pécuniaires. Tertio, remettre l’armée à ses fonctions régaliennes, à savoir la défense des frontières contre toutes attaques déstabilisatrices des institutions.
On le sait le président Roch KABORE depuis sa prise du pouvoir à témoigner sa ferme volonté de voir les militaires loin de la chose politique. Son régime gagne ainsi une victoire. Celle d’avoir pu tenir le procès jusqu’au bout dans un climat d’insécurité fait d’attaques terroristes multiples. Mais aussi de rappeler à ceux qui l’auraient oublié que les fondements de la démocratie résident dans le renouvellement des élus locaux et nationaux à travers la victoire par les urnes.L’on pourrait souhaiter également que ce procès soit celui de la mort définitive (ndlr, une deuxième après son démantèlement) du Régiment de sécurité présidentiel (RSP), une milice de tueurs à gage à la solde du président déchu Blaise COMPAORE et qui ne faisait pas honneur à la démocratie burkinabè. Enfin, les victimes peuvent se faire bonne conscience dans la mesure ou le bourreau se retrouvera derrière les barreaux. Le Burkina démocratique renait de ses cendres ? D’autres procès de la république (Thomas SANKARA, Norbert ZONGO…) à la sensibilité encore plus poussée devront nous édifier pour qu’on en soit plus sûr.
Roger SAWADOGO.
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